M. Ohana , G. Ferretti , M. Montaudon and P.-Y. Le Roux
Plan du chapitre
Compétences
Communication
La radiographie du thorax est, en 2017, l'examen radiologique le plus pratiqué en France avec environ 13 millions de clichés annuels, concernant dans 60 % des cas des patients hospitalisés.
Dans ce chapitre, nous présentons les critères de qualité d'une radiographie du thorax, les éléments essentiels de sa séméiologie et ses indications résiduelles.
La radiographie du thorax de face est acquise dans la mesure du possible en incidence postéro-antérieure, patient debout, de face stricte, en inspiration profonde et correctement contrastée, afin d'être interprétable (figure 23.1).
L'incidence postéro-antérieurerépond à des critères de réalisation stricts : le patient est face contre le capteur de rayons X, dos au tube qui est situé à 1,8 mètre afin de limiter au maximum les déformations géométriques et de ne pas augmenter artificiellement la taille du cœur, situé dans le compartiment antérieur du médiastin. Les radiographies réalisées au lit sont acquises en incidence antéro-postérieure, entraînant une majoration de taille du cœur (cf. « Radiographie ») rendant peu fiable l'appréciation du rapport cardiothoracique. L'acquisition en position debout permet de dégager les culs-de-sac pleuraux latéraux et autorise une inspiration maximale. Les radiographies acquises en position assise ou au lit sont de moins bonne qualité. La présence d'un niveau hydroaérique dans l'estomac, sous la coupole diaphragmatique gauche, est un bon indicateur de cliché acquis en position debout. La position couchée est généralement spécifiée sur le cliché.
L'obtention d'une face stricte est assurée par un centrage précis du patient. Il se vérifie sur le cliché de radiographie du thorax par :
L'inspiration maximale se vérifie par la visualisation d'un nombre suffisant d'arcs costaux antérieurs : il faut pouvoir compter au moins six arcs costaux antérieurs au-dessus de la coupole diaphragmatique droite.
Le réglage du contraste, qui peut être affiné a posteriori si l'examen est lu sur support informatique, doit permettre de visualiser la silhouette des corps vertébraux thoraciques en arrière du médiastin.
Ce n'est qu'après s'être assuré de la qualité du cliché de radiographie du thorax que l'on peut passer à son interprétation. Inversement, tout cliché ne respectant pas ces critères de qualité ne doit être interprété qu'avec la plus extrême précaution, en particulier les radiographies du thorax réalisées au lit sont souvent mal inspirées et mal centrées, ce qui peut très facilement créer de fausses images (syndrome interstitiel, foyer de condensation, cardiomégalie, masse médiastinale) ou, au contraire, en masquer (figure 23.2). Il ne faut pas hésiter à refaire un cliché jugé techniquement insuffisant.
Afin de vous aider à ne pas « oublier » de regarder un des compartiments anatomiques du thorax et à ne pas négliger une anomalie, nous vous proposons, sans oublier la check-list, de suivre le plan de lecture systématique et organisé de la radiographie thoracique suivant :
Les clichés complémentaires de la radiographie du thorax de face sont :
La radiographie standard est une imagerie de transmission et de projection (cf. « Radiographie ») :
Une opacité pulmonaire se traduit par une augmentation de la densité, comparativement au parenchyme pulmonaire adjacent, c'est-à-dire par une image plus « blanche ». Cette augmentation peut être plus ou moins marquée selon la composition et la taille de l'anomalie : une lésion calcifiée est plus opaque (« blanche ») qu'une lésion tissulaire, qui est elle-même plus opaque qu'une lésion graisseuse.
Une clarté est une diminution de la densité, c'est-à-dire une image plus « noire ». La clarté est due à un remplacement du parenchyme pulmonaire normal par de l'air qui n'atténue plus la transmission des rayons X (cf. «Radiographie »).
Une fois ces anomalies repérées, il faut déterminer leur localisation :
Une fois la lésion localisée, il faut étudier ses caractéristiques :
Afin de limiter le nombre de radiographies du thorax inutiles, la HAS a établi en 2009 une liste des non-indications principales de la radiographie du thorax :
Le thorax, y compris en imagerie cardiaque, est un domaine où la TDM excelle, du fait de sa haute résolution spatiale et du contraste naturel élevé entre les structures (cf. « Tomodensitométrie »).
L'interprétation d'une TDM thoracique se fait sur une console informatique, qui permet une adaptation en temps réel du contraste, des zooms, des reconstructions multiplanaires dans les trois plans de l'espace et des reconstructions obliques selon le plan des vaisseaux et un défilement facilitant le repérage d'anomalies.
Une TDM thoracique peut s'analyser en trois étapes successives (figure 23.7) :
Les structures vasculaires et tissulaires médiastinales sont analysées après injection d'un produit de contraste iodé en intraveineux, avec possibilité de réaliser des acquisitions à différents temps (figure 23.8) :
L'injection de produit de contraste consiste en une administration de 50 à 120 ml de produit de contraste par une veine du membre supérieur à un débit compris entre 1,5 et 5 ml/s. Pour le temps artériel, le déclenchement de l'acquisition se fait par méthode de suivi de l'embole (« bolus-tracking »), avec réalisation d'une coupe test au niveau de l'artère pulmonaire ou de l'aorte, permettant de déclencher l'acquisition au moment exact où ces vaisseaux sont parfaitement opacifiés.
L'analyse des gros vaisseaux du médiastin nécessite une injection de produit de contraste qui permet principalement d'opacifier l'aorte thoracique (aorte ascendante, crosse aortique avec l'origine des troncs supra-aortiques et aorte thoracique descendante) et les artères pulmonaires.
Pour chaque vaisseau, on analyse (figure 23.9) :
La recherche de nœuds lymphatiques médiastinaux(ou ganglions) anormaux (adénopathies) est facilitée par l'injection de produit de contraste, qui permet de mieux les différencier des vaisseaux. Ils sont principalement recherchés au niveau des hiles, autour de la trachée et à gauche de la crosse aortique (figure 23.10). La TDM thoracique peut aussi révéler des nœuds lymphatiques axillaires, supraclaviculaires ou jugulocarotidiens bas.
Pour chaque nœud lymphatique décelé, on étudie :
Un épanchement pleural ou péricardique se visualise facilement en TDM (figure 23.11).
Son abondance est évaluée par la mesure de son épaisseur dans un plan horizontal : un épanchement pleural de plus de 4 cm et un épanchement péricardique de plus de 1 cm peuvent être considérés comme abondants.
Devant tout épanchement pleural, il faut rechercher des nodules tissulaires accolés aux parois, reconnus à leur densité différente du liquide d'épanchement (figure 23.12). La constatation de tels nodules est en faveur d'une origine néoplasique de l'épanchement : soit lésion pleurale primitive type mésothéliome, soit métastase pleurale.
L'étude du parenchyme pulmonaire ne requiert pas nécessairement l'injection de produit de contraste. La TDM permet de préciser des anomalies visibles éventuellement sur une radiographie du thorax regroupées en deux syndromes :
Devant un nodule pulmonaire, il faut analyser (figure 23.14) :
La TDM thoracique nécessite des doses de rayonnements ionisants entre 10 et 300 fois plus élevées (selon le morphotype du patient) que pour une radiographie du thorax. Ainsi, ses indications doivent être parfaitement justifiées afin de limiter l'exposition des patients aux rayonnements ionisants.
Dans la recherche et/ou l'analyse d'anomalies parenchymateuses (pneumopathies infectieuses compliquées, nodules parenchymateux, pneumopathies interstitielles, recherche d'un pneumothorax, etc.), une TDM sans injection est suffisante.
Dans le bilan d'anomalies médiastinales, qu'elles soient tissulaires (recherche d'adénopathies médiastino-hilaires, bilan de tumeurs médiastinales, analyse d'épanchements chroniques ou cloisonnés) ou vasculaires (analyse des artères pulmonaires dans le cadre d'une suspicion d'embolie pulmonaire, analyse de l'aorte, bilan d'hémoptysies, etc.), une injection de produit de contraste est nécessaire, avec un temps d'acquisition (artériel pulmonaire, artériel aortique ou veineux) adapté à l'affection recherchée.
La scintigraphie pulmonaire permet de visualiser la distribution régionale des deux grands systèmes nécessaires à l'hématose : la perfusion et la ventilation pulmonaire.
L'étude de la perfusion se fait après injection au niveau d'une veine périphérique de macro-agrégats d'albumine marqués au 99mTc. Ces particules ont un diamètre de l'ordre de quelques dizaines de microns, supérieur au diamètre des capillaires pulmonaires. La fixation du traceur est donc mécanique, par blocage (embolisation) au niveau des précapillaires pulmonaires. Environ 1 capillaire sur 10 000 est obstrué, l'examen ne présente donc pas de risque pour le patient.
L'étude de la ventilation se fait après inhalation d'un gaz radioactif (krypton-81m [81mKr]) ou d'aérosols (particules de carbone ou phytates) marqués avec du 99mTc, qui vont se déposer au niveau des parois bronchiques selon la ventilation régionale.
L'examen est réalisé à l'aide d'une gamma-caméra. Deux modes d'acquisition sont possibles : planaire (six incidences sont classiquement réalisées : antérieure, postérieure, deux incidences obliques postérieures et deux profils) ou tomographique qui va permettre, comme pour une TDM, la reconstruction des images dans les trois plans de l'espace.
Dans une scintigraphie de perfusion normale, la distribution du radiotraceur est homogène sur l'ensemble du parenchyme pulmonaire. Les hiles et le médiastin ne sont pas hyperfixants (les macro-agrégats sont bloqués au niveau des précapillaires pulmonaires, ils ne circulent plus). L'injection étant réalisée en décubitus dorsal, il existe fréquemment un gradient physiologique de fixation antéropostérieur du fait de la gravité.
Quand le flux sanguin est interrompu ou significativement altéré dans une région du poumon, celle-ci apparaît comme une zone hypofixante ou non fixante. Ainsi, la scintigraphie de perfusion montre la distribution régionale du flux sanguin artériel pulmonaire.
Dans une scintigraphie de ventilation normale, la distribution du radiotraceur est également homogène. Si un gaz radioactif est utilisé (81mKr), la trachée et les bronches proximales sont visualisées. Avec les aérosols, des foyers très hyperfixants sont parfois visualisés correspondant à des impactions focales du radiotraceur au niveau des bifurcations bronchiques.
Comme pour les images de ventilation, une diminution ou d'absence de ventilation dans un territoire se traduira sur les images comme une zone hypofixante ou non fixante.
L'interprétation d'une scintigraphie pulmonaire de ventilation-perfusion repose sur une analyse comparative des images de ventilation et de perfusion.
Pour chaque hypofixation décelée, on précisera :
L'indication principale de la scintigraphie pulmonaire de ventilation-perfusion est la recherche d'embolie pulmonaire (figure 23.15). Selon le niveau de l'obstruction et le diamètre du caillot, tout le poumon, ou une partie, est privé de sang. Cette obstruction se traduit en scintigraphie pulmonaire par une hypofixation systématisée sur les images de perfusion (absence de vascularisation en aval de l'embole), non retrouvée sur les images de ventilation (absence de conséquence sur la ventilation à la phase aiguë de l'embolie pulmonaire).
L'examen peut également être utilisé quand il est utile d'évaluer la distribution régionale de la perfusion et de la ventilation pulmonaire, par exemple dans le cadre du bilan préopératoire d'un cancer pulmonaire.
TEP au 18F-FDG
De façon physiologique, les poumons remplis d'air apparaissent hypofixants. Le médiastin présente une hyperfixation modérée correspondant au FDG présent dans la circulation sanguine. Une fixation du myocarde, parfois hétérogène, est fréquente et physiologique.
Lors de l'interprétation, on recherchera des hyperfixations pathologiques sur les images TEP, les images TDM couplées permettant de préciser leur correspondance anatomique. Pour chaque hyperfixation, on précisera son intensité, son caractère focal ou diffus, sa correspondance anatomique.
La TEP pulmonaire est indiquée pour caractériser les nodules pulmonaires de taille supérieure à 6–7 mm : un nodule ne fixant pas le FDG (non hypermétabolique) peut être surveillé par imagerie radiologique. En revanche, un nodule hypermétabolique doit faire l'objet d'un contrôle histologique.
La TEP est également indiquée lors du bilan d'extension des cancers pulmonaires pour évaluer l'extension lymphatique et métastatique à distance de la maladie (figure 23.16). Elle permet de plus d'apprécier la réponse aux traitements antitumoraux et de détecter les récidives.
La TEP au 18F-FDG présente également un intérêt pour le bilan de maladie inflammatoire (sarcoïdose par exemple) (cf. « Processus inflammatoires») ou de maladies infectieuses (infection de prothèse) (cf. « Processus infectieux »).
La radiographie thoracique de face reste l'examen princeps en imagerie thoracique. Elle doit répondre à des critères de qualité stricts afin d'être interprétable. Elle s'analyse de manière systématique.
La TDM thoracique est l'examen de référence pour l'analyse du parenchyme (injection de produit de contraste non obligatoire), et du médiastin (injection de produit de contraste nécessaire). Elle s'analyse sur console de travail, de manière dynamique, en exploitant les possibilités de reconstructions et de modification du contraste. Elle est entre 10 et 300 fois plus irradiante qu'une radiographie du thorax de face.
La scintigraphie pulmonaire permet la visualisation de la distribution régionale de la ventilation et de la perfusion pulmonaires. Sa principale indication est la suspicion d'embolie pulmonaire.
La TEP au 18F-FDG est un examen essentiel en oncologie thoracique, notamment pour la caractérisation des nodules pulmonaires, le bilan d'extension et la recherche de récidive des cancers pulmonaires.
Lacey G, Morley S, Berman L. La radiographie thoracique. Manuel pratique. Traduction L. Arrivé. Elsevier/Masson ; 2009.