Objectifs pédagogiques
Les points clefs à retenir
La prescription des gaz du sang est médicale et indiquée en cas de situation grave (défaillance respiratoire, défaillance hémodynamique, défaillance rénale), en cas de désordre métabolique sur le ionogramme pouvant interférer avec l’équilibre acido-basique (dysbicarbonatémie, dyschlorémie, dyskaliémie), l’adaptation ou la surveillance d’un traitement (oxygénothérapie, ventilation mécanique, épuration extra-rénale).
L’objectif est de préciser les paramètres respiratoires (PaO2, PaCO2, SaO2) et de l’équilibre acido-basique.
Les gaz du sang sont prélevés en artériel, en privilégiant l’artère radiale, après des précautions d’asepsie stricte, sans air, dans une seringue héparinée, puis acheminés immédiatement au laboratoire à température ambiante. Après réalisation, une compression doit être exercée au dessus du point de ponction.
Des informations recueillies lors du prélèvement sont nécessaires à leur interprétation: la température corporelle, les conditions de ventilation et d’oxygénation (ventilation spontanée et débit d’oxygène en litre/min, ventilation mécanique et FiO2 en %).
Les risques sont l’échec, la ponction veineuse, la perforation de l’artère, l’hématome, la dissection artérielle voire l’ischémie aiguë de membre.
La réalisation des gaz du sang peut être déléguée à une infirmière diplômée d’état. La responsabilité directe de l’opérateur peut être engagée.
Les valeurs mesurées sont:
L’hypoxémie est abordée dans le chapitre sur l’insuffisance respiratoire.
L’équilibre acido-basique, ou homéostasie du pH, est une fonction essentielle de l’organisme et la concentration d’ions H+ est étroitement régulée.
Bien que la concentration en H+ soit très faible (0,00004 mEq/l dans le sang artériel), une variation modeste du pH correspond à une variation importante de la concentration en ion H+ : pH = -log (H+).
La première étape pour interpréter les gaz du sang est d’identifier le changement de pH (figure 1).
La deuxième étape est d’identifier l’origine du changement de pH et l’adaptation au changement de pH en analysant les trois paramètres reliés par l’équation d’Henderson-Hasselbach : le pH, la PaCO2 et les bicarbonates plasmatiques selon l’équation HCO3- + H+ → H2CO3 → CO2 + H20 (figure 1).
H2CO3 est l’acide carbonique, capable de se dissocier en libérant des ions H+ en solution aqueuse. Les ions bicarbonates HCO3- sont la base, capable de fixer des ions H+ en solution aqueuse. pH = pKa + log (Base)/(Acide) = pKa + log (HCO3-)/(H2CO3) = 6,1 + log (HCO3-)/(0,03xPaCO2) |
L’origine du changement de pH est respiratoire et/ou métabolique. Les variations du pH et de la concentration en H+ sont induites par des altérations de la PCO2 (acidose et alcalose respiratoire) et/ou des altérations de la concentration en bicarbonates (acidose et alcalose métabolique).
L’adaptation au changement de pH dépend de trois mécanismes : les systèmes tampons, la ventilation, la régulation rénale d’ions H+ et d’ions HCO3-.
- une sécrétion active d’ions H+
- une réabsorption d’ions HCO3- filtrés
- une production de nouveaux HCO3-
La sécrétion d’ions hydrogène et la réabsorption de bicarbonates ont lieu dans la plus grande partie du tubule, principalement au niveau du tube proximal. Pour chaque ion bicarbonate réabsorbé, un ion hydrogène est sécrété. La sécrétion d’ions hydrogène est un transport actif via un contre-courant sodium hydrogène. Le lien entre la sécrétion d’ions H+ et la réabsorption d’HCO3- est illustré dans la figure 2.
Dans les tubules, il y a titration des ions bicarbonates par les ions hydrogène : en cas d’acidose métabolique, c’est-à-dire d’excès d’ions H+, il y a une réabsorption complète des ions HCO3-, ce qui contribue à corriger l’acidose ; en cas d’alcalose, c’est-à-dire d’excès d’ions HCO3-, ces ions HCO3- ne peuvent pas être réabsorbés et sont excrétés dans l’urine ce qui contribue à corriger l’alcalose.
Les délais de compensations dépendent de la variable qui assure la compensation (immédiat pour le système tampon, relativement rapide pour la compensation respiratoire, plus lente pour la compensation rénale) et permettent de distinguer une situation aiguë d’une situation chronique. Ainsi, en cas d’acidose métabolique, l’adaptation respiratoire est une hyperventilation alvéolaire rapide ; en cas d’acidose respiratoire, l’adaptation rénale est une réabsorption retardée des bicarbonates.
Pour l’interprétation, il faut se souvenir que:
La troisième étape est d’identifier l’étiologie du désordre acido-basique (cf acidose respiratoire et acidose métabolique).
Figure 1 : Interprétation d’un déséquilibre acido-basique au gaz du sang artériel.
Figure 2 : Mécanismes cellulaires de la sécrétion d’ions H+ et de la réabsorption d’ions bicarbonates au niveau du tubule rénal.
L’acidose métabolique est définie par une diminution du pH <7,38 (ou par une augmentation de la concentration en ion H+) liée à une baisse de la concentration plasmatique en tampons bicarbonates <25 mmol/l/.
La réponse compensatrice respiratoire est une augmentation de la ventilation alvéolaire à l’origine d’une diminution de la PaCO2 (la PaCO2 diminue d’environ 1,25 mmHg pour chaque baisse de 1 mmol/l de la bicarbonatémie). Si la compensation est complète (le pH est normalisé), il faut suspecter un trouble acido-basique complexe associant une acidose métabolique et une alcalose respiratoire.
Une acidose métabolique peut être suspectée devant un contexte évocateur (insuffisance rénale, état de choc, acidocétose diabétique), des signes cliniques (polypnée), des anomalies du ionogramme sanguin (baisse de la bicarbonatémie, hyperkaliémie).
La gravité dépend essentiellement de l’étiologie de l’acidose métabolique. L’acidose métabolique s’accompagne d’une hyperventilation alvéolaire compensatrice qui peut être à l’origine d’une détresse respiratoire aiguë. L’acidose s’accompagne d’une hyperkaliémie par transfert intra vers extracellulaire qui peut être à l’origine de troubles de la conduction et de troubles du rythme. Une acidose grave impose l’hospitalisation en réanimation.
La première étape du diagnostic étiologique des acidoses métaboliques est le calcul du trou anionique (figure 3).
Le principe de l’électroneutralité implique que la somme des cations soit égale à la somme des anions. Na+ représente environ 95% des charges positives alors que HCO3- et Cl- représentent environ 85% des anions. Cette disparité arbitraire entre la somme des cations et des anions représente le trou anionique : TA = Na+ – (Cl- + HCO3-).
Le trou anionique correspond à la somme des anions non dosés en pratique courante qui sont principalement représentés par les charges négatives sur les protéines (protéinates, notamment l’albuminate) et dans une moindre mesure par les phosphates, les sulfates et d’autres anions organiques.
Les valeurs normales du trou anionique sont de 12 +/-2 mmol/l dont 11 mmol/l sont liées aux charges négatives de l’albumine. Le calcul du TA doit être ajusté en fonction de valeurs de l’albuminémie (réduction de 4mmol/l pour chaque 10g/L d’albumine en moins).
On distingue les acidoses métaboliques à TA augmenté, dites organiques et les acidoses métaboliques à TA normal, dites minérales (figure 3).
Figure 3 : Représentation schématique des deux grandes classes d’acidose métabolique
L’acidose métabolique aiguë sévère (pH<7,10) est une situation grave mettant en jeu le pronostic vital. Le traitement est avant tout étiologique. Le traitement symptomatique comprend :
Le traitement des acidoses chroniques d’origine rénale est spécifique.
L’acidose respiratoire est définie par une diminution du pH <7,38 (ou augmentation de la concentration en ion H+) liée à une augmentation de la PaCO2 >42 mmol/l, secondaire à une hypoventilation alvéolaire.
La réponse compensatrice rénale est une augmentation de réabsorption rénale de bicarbonates à l’origine d’une augmentation de la bicarbonatémie. Dans une situation aiguë, l’élévation des bicarbonates est absente ou très modeste. Dans une situation chronique (insuffisance respiratoire chronique), l’élévation de la bicarbonatémie est importante et traduit l’adaptation rénale. Ces deux situations permettent de différencier une insuffisance respiratoire chronique d’une insuffisance respiratoire aiguë.
Si la compensation est complète, il faut suspecter un trouble acido-basique complexe associant une acidose respiratoire et une alcalose métabolique. Une acidose respiratoire peut être suspectée devant un contexte évocateur et des signes cliniques (insuffisance respiratoire aiguë, insuffisance respiratoire chronique), des anomalies du ionogramme sanguin (augmentation de la bicarbonatémie, hyperkaliémie).
La gravité dépend du degré de l’hypoventilation alvéolaire, du caractère aiguë ou chronique de l’hypoventilation, et de l’étiologie sous-jacente. Le coma hypercapnique est particulièrement redouté. Une acidose en rapport avec une insuffisance respiratoire aiguë impose l’hospitalisation en réanimation.
Les étiologies des acidoses respiratoires sont celles de l’hypoventilation alvéolaire.
La ventilation alvéolaire dépend de la ventilation minute (VE = Vt x FR) et de la ventilation de l’espace mort (VD) : VA = VE – VD. Le principal mécanisme à l’origine d’une hypoventilation alvéolaire est une diminution de la ventilation minute. La ventilation minute dépend de la commande neurologique centrale et de l’effecteur musculaire périphérique (diaphragme et muscles respiratoires accessoires).
Les étiologies d’hypoventilation alvéolaire sont ainsi neurologiques (traumatisme crânien, accident vasculaire cérébral, tumeur cérébrale) et respiratoires (étiologies des insuffisances respiratoires aiguës et chroniques).
Le traitement est avant tout étiologique. Le traitement symptomatique comprend l’élimination du CO2 en assurant la ventilation alvéolaire, mécaniquement si nécessaire.
L’alcalose métabolique est définie par une augmentation du pH >7,42 (ou par une diminution de la concentration en ion H+) liée à une augmentation de la concentration plasmatique en tampons bicarbonates >25 mmol/l/.
La réponse compensatrice respiratoire est une diminution de la ventilation alvéolaire à l’origine d’une augmentation de la PaCO2. Si la compensation est complète (le pH est normalisé), il faut suspecter un trouble acido-basique complexe associant une alcalose métabolique et une acidose respiratoire. La gravité dépend essentiellement de l’étiologie de l’alcalose métabolique. L’acidose métabolique s’accompagne d’une hypoventilation alvéolaire compensatrice qui peut être à l’origine d’une encéphalopathie hypercapnique. L’alcalose s’accompagne d’une hypokaliémie par transfert extra vers intracellulaire qui peut être à l’origine de troubles de la conduction et de troubles du rythme.
L’alcalose métabolique est secondaire à une charge alcaline (par perte d’ions H+ ou par surcharge en HCO3-) associé à une défaut d’excrétion rénale des bicarbonates. L’alcalose métabolique peut être secondaire à:
L’entretien d’une alcalose métabolique est toujours d’origine rénale : baisse de la filtration glomérulaire, contraction volumique, hypokaliémie, hypochlorémie.
L’alcalose respiratoire est définie par une augmentation du pH >7,42 (ou par une diminution de la concentration en ion H+) liée à une diminution de la PaCO2 <38mmHg.
La réponse compensatrice rénale est une diminution de l’excrétion rénale de H+, à l’origine d’une diminution de la réabsorption de H+. Si la compensation est complète (le pH est normalisé), il faut suspecter un trouble acido-basique complexe associant une alcalose respiratoire et une acidose métabolique. La gravité dépend essentiellement de l’étiologie de l’alcalose respiratoire. L’alcalose s’accompagne d’une hypokaliémie par transfert extra vers intracellulaire qui peut être à l’origine de troubles de la conduction et de troubles du rythme.
Une alcalose respiratoire est secondaire à une hyperventilation alvéolaire d’origine centrale (anxiété, douleur, fièvre, atteinte neurologique) ou périphérique (secondaire à une hypoxémie).
Le ionogramme sanguin est un dosage des concentrations plasmatiques qui reflète l’homéostasie du milieu intérieur. La prescription est médicale, les indications sont larges.
Les principaux éléments du ionogramme sanguin sont :
- les concentrations plasmatiques d’ions : sodium, potassium, chlore, bicarbonates
- les protéines plasmatiques
- les déchets du métabolisme : urée et créatinine plasmatiques
Le maintien du volume des liquides de l’organisme et de leur composition est essentiel pour l’homéostasie. Le liquide de l’organisme est réparti entre deux principaux compartiments : le liquide extracellulaire représente 60% du poids du corps et comprend le liquide interstitiel et liquide plasmatique dont les compositions ioniques sont les mêmes ; et le liquide intracellulaire qui représente 40% du poids du corps (figure 4).
Le volume du liquide extracellulaire est déterminé avant tout par l’égalité entre les entrées et les sorties d’eau et de sodium. La régulation du volume extracellulaire dépend essentiellement de la régulation du contenu en chlorure de sodium dans le liquide extracellulaire parce que sa variation est accompagnée d’une variation proportionnelle du volume de liquide extracellulaire de sorte que la concentration de sodium dans celui-ci soit constante.
Le volume de liquide intracellulaire est déterminé avant tout par les différences d’osmolarité entre le milieu intra et extracellulaire. En effet, la répartition du liquide entre les milieux intra et extracellulaires dépend essentiellement de l’effet osmotique des plus petites substances dissoutes de part et d’autre de la membrane des cellules. La membrane cellulaire est très perméable à l’eau mais relativement peu aux petits ions, l’eau traverse la membrane cellulaire du compartiment le moins concentré en substances dissoutes vers le compartiment le plus concentré en substances dissoutes, de sorte que le liquide intracellulaire soit isotonique au liquide extracellulaire. Des changements de concentration relativement peu importants de substances osmotiquement actives dans le liquide extracellulaire peuvent entrainer de grands changements de volume du liquide intracellulaire.
Le sodium et les anions qui lui sont associés (le chlore principalement), représentent environ 90% de l’osmolarité plasmatique. L’osmolarité plasmatique, nombre d’osmoles par litre d’eau, non mesurée en pratique courante, est calculée selon la formule suivante:
Osmp = Natrémie x2 + Glycémie = 285 +/- 5 mOsm/l
La mesure de la concentration de sodium dans le plasma (Natrémie) est donc essentielle pour évaluer l’état d’hydratation intracellulaire de l’organisme.
L’hyponatrémie est souvent le reflet d’une hypo-osmolarité plasmatique, à l’origine d’un transfert d’eau du milieu extracellulaire vers le milieu intracellulaire : c’est l’hyperhydratation cellulaire.
L’hypernatrémie est le reflet d’une hyperosmolarité plasmatique, à l’origine d’un transfert d’eau du milieu intracellulaire vers le milieu extracellulaire : c’est la déshydratation intracellulaire.
L’osmolarité, qui reflète l’état d’hydratation intracellulaire, est ajustée en grande partie par l’intermédiaire de la régulation rénale du bilan de l’eau via l’hormone antidiurétique (ADH). L’ADH, peptide synthétisé par l’hypothalamus, agit au niveau du tube collecteur en augmentant leur perméabilité à l’eau et module ainsi la réabsorption de l’eau. Le principal stimulus de la sécrétion d’ADH est l’osmolarité plasmatique : en cas d’hypoosmolarité plasmatique (hyperhydratation intracellulaire), la sécrétion d’ADH est réduite ce qui diminue la perméabilité à l’eau du tubule distal et du tube collecteur, et augmente ainsi l’excrétion rénale d’eau ; en cas d’hyperosmolarité plasmatique (hyperhydratation intracellulaire), la sécrétion d’ADH par l’hypophyse est augmentée, ce qui augmente la perméabilité à l’eau du tubule distale et du tube collecteur, et diminue ainsi l’excrétion rénale d’eau). En conclusion, la natrémie est le reflet de l’osmolarité, du bilan hydrique et de l’hydratation intracellulaire, le sel est le reflet du bilan sodé et de l’hydratation extracellulaire.
Figure 4: Compartiments liquidiens de l’organisme et osmose
Le diagnostic positif est biologique. L’hypernatrémie est définie par une concentration plasmatique de sodium >145 mmol/l. Devant une hypernatrémie, il est essentiel de confirmer l’hyperosmolarité par le calcul ou la mesure de l’osmolarité plasmatique. En cas d’hypernatrémie hyperosmolaire, le diagnostic retenu est alors celui d’une déshydratation intracellulaire liée à une hyperosmolarité plasmatique reflétée par une hypernatrémie.
Les signes cliniques comprennent une sécheresse des muqueuses associée souvent à une soif intense. Les troubles neurologiques, non spécifiques (somnolence, fièvre, convulsion, coma), font la gravité de la déshydratation intracellulaire. Un syndrome polyuro-polydyspsique est observé en cas de cause rénale.
Trois mécanismes physiopathologiques doivent être recherchés :
- un excès de perte d’eau non compensée : « insensible » (cutané ou respiratoire), rénale (défaut de synthèse ou d’action de l’ADH (diabète insipide), polyurie osmotique), digestive (diarrhée) ;
- un défaut d’apport en eau : âges extrêmes (altération de la sensation de soif) ;
- un excès d’apport de sodium : bicarbonate de sodium molaire.
L’évaluation clinico-biologique du secteur extracellulaire est la première étape du diagnostic étiologique (pression artérielle, fréquence cardiaque, examen cutané, diurèse, protidémie, hématocrite).
o d’origine rénale (natriurèse >20mmol/l) : polyurie osmotique (glycosurie)
o d’origine digestive (natriurèse <20mmol/l) : diarrhées, fistules
o d’origine rénale : diabète insipide (défaut d’ADH) central (défaut de synthèse: traumatisme crânien, encéphalite infectieuse, congénital) et néphrogénique (défaut de réponse rénale à l’ADH : maladies rénales, diurétiques de l’anse, lithium)
o d’origine « insensible » : cutanée ou respiratoire
o apports excessifs de NaCl
o hyperaldostéronisme
Le traitement est étiologique. Le traitement symptomatique consiste en un apport d’eau prudent dont la quantité est déterminé à partir du calcul du déficit en eau.
Déficit en eau =0,6 x Poids x ((Natrémie/140) -1) |
L’eau peut être administrée par voie orale ou par voie intraveineuse avec des solutés hypoosmolaire (Glucosé 2,5%). En cas de déshydratation globale, la correction du secteur extracellulaire sera privilégiée avec l’apport de soluté isotonique (NaCl 0,9%).
Le diagnostic positif est biologique. L’hyponatrémie est définie par une concentration plasmatique de sodium <135 mmol/l. Elle est habituellement le reflet d’une hypoosmolarité plasmatique.
Devant une hyponatrémie, il est essentiel de confirmer l’hypoosmolarité (Osmp < 285mosmol/l)
En l’absence d’administration de substance hyperosmolaire (mannitol, glycocole), l’osmolarité plasmatique peut être estimée par la formule
Osmp = Nax2 + glycémie |
Le diagnostic retenu est alors celui d’une hyperhydratation intracellulaire liée à une hypoosmolarité plasmatique reflétée par une hyponatrémie. Une hyponatrémie associée à une hyperosmolarité plasmatique doit faire suspecter la perfusion de soluté hyperosmolaire (G30%, mannitol 20%), une intoxication (éthanol, méthanol, glycocole), une augmentation rapide de l’urée ou plasmatique ou de la glycémie. Une hyponatrémie associée à une osmolarité plasmatique normale doit faire suspecter une hyperprotidémie ou une hypertriglycéridémie.
Les signes cliniques comprennent des signes neurologiques non spécifiques (céphalées, nausées, vomissement, obnubilation, convulsion, coma). L’hyponatrémie sévère, notamment lorsque son début est aigu, peut entrainer un œdème cérébral avec le risque de lésions neurologiques irréversibles ou de décès. Une absence de soif ou un dégoût de l’eau peuvent être évocateur.
Deux mécanismes physiopathologiques doivent être recherchés:
- un excès d’apport en eau : potomanie
- un défaut d’élimination de l’eau : hypovolémie, SIADH.
L’évaluation clinico-biologique du secteur extracellulaire est la première étape du diagnostic étiologique (pression artérielle, fréquence cardiaque, examen cutané, diurèse, protidémie, hématocrite).
o insuffisance cardiaque
o insuffisance hépatocellulaire
o syndrome néphrotique, insuffisance rénale
o origine rénale : SIADH
o origine endocrinienne : hypothyroïdie
o origine rénale
o origine digestive
o origine cutanée
Le traitement est étiologique. Le traitement symptomatique consiste principalement en une restriction hydrique. La vitesse de correction d’une hyponatrémie dépend du caractère aigu ou chronique, symptomatique ou non de l’hyponatrémie. Le traitement d’une hyponatrémie aiguë et/ou symptomatique repose sur la restriction hydrique éventuellement associée à l’apport de sel par voie orale ou par perfusion de soluté salés hypertoniques, et/ou à des diurétiques de l’anse pour augmenter la clairance de l’eau libre.
La concentration du potassium dans le liquide extracellulaire est finement régulée à 4,0 mmol/L. Cette régulation est indispensable car de nombreuses fonctions cellulaires sont affectées par le changement de concentration du potassium. Le potassium extracellulaire ne représente que 2% du potassium total de l’organisme, le potassium étant situé pour 98% dans le secteur intracellulaire.
L’équilibre du bilan potassique dépend essentiellement de son excrétion rénale, résultat de trois processus : la filtration glomérulaire, la réabsorption tubulaire, la sécrétion tubulaire. Une diminution importante du débit de filtration glomérulaire (insuffisance rénale) peut être la cause d’une rétention de potassium. Le potassium est réabsorbé dans le tubule proximal et dans la branche ascendante de Henlé de sorte que n’arrive dans le tubule distal que 8% de la quantité filtrée. Les variations de l’excrétion rénale de potassium dépendent principalement de la réabsorption et de la sécrétion dans le tubule distal et le tube collecteur. Les facteurs stimulants les plus importants de la sécrétion distale de potassium sont l’augmentation de la concentration extracellulaire de potassium, l’augmentation de l’aldostérone, l’augmentation du débit du liquide tubulaire.
La répartition du potassium entre les milieux intra et extracellulaires est un élément important : l’insuline, l’aldostérone, la stimulation éta-adrénergique, l’alcalose favorisent l’entrée du potassium dans la cellule ; l’insulinopénie, l’hypoaldostéronisme, le blocage éta-adrénergique, l’acidose, la lyse cellulaire, l’exercice intense favorisent la sortie du potassium des cellules. La redistribution du potassium entre les compartiments intra et extracellulaires est la première ligne de défense contre les changements de la concentration de potassium extracellulaire.
Le diagnostic positif est biologique. L’hyperkaliémie est définie par une concentration plasmatique de potassium supérieure à 5,0 mmol/L. Des fausses hyperkaliémies sont dues au transfert extracorporel de potassium du milieu intracellulaire vers le milieu extracellulaire, particulièrement en cas d’hémolyse lors d’un prélèvement veineux avec un garrot serré, de centrifugation tardive du tube ou de thrombocytémie.
La gravité dépend du caractère aigu ou chronique, du taux de potassium, et du terrain cardiovasculaire sous-jacent. Une hyperkaliémie importante et brutale peut mettre en jeu le pronostic vital à court terme et nécessite une hospitalisation en réanimation. Le retentissement clinique d’une hyperkaliémie est principalement cardiaque et musculaire. Les signes cardiologiques se manifestent par des modifications électrocardiographiques diffuses d’apparition progressive : onde T amples pointues et symétriques, troubles de la conduction auriculaire (disparition des ondes P) auriculo-ventriculaire puis intra ventriculaire (élargissement des QRS), tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire, arrêt cardiaque. La réalisation d’un ECG est systématique devant tout diagnostic présumé ou confirmé d’hyperkaliémie. Les signes neuromusculaires sont non spécifiques : paresthésies, faiblesse musculaire.
Après avoir éliminé une fausse hyperkaliémie, trois mécanismes physiopathologiques doivent être recherchés, la kaliurèse doit être mesurée (prescription d’un ionogramme urinaire).
- Un excès d’apport : calcul des apports potassiques (1g de KCL correspond à 13 mmol de K+) ;
- Un transfert intra extracellulaire: acidose métabolique, lyse cellulaire (rhabdomyolyse, lyse tumorale, brûlure), déficit en insuline (diabète mal équilibré), médicaments (succinylcholine, digitaliques) ;
- Un défaut d’élimination : insuffisance rénale aiguë et chronique, hypoaldostéronisme (insuffisance surrénale, modulateurs du systeme rénine angiotensine), résistance à l’action de l’aldostérone (spironolactone, diurétiques épargneurs de potassium).
Le traitement est étiologique. Le traitement est symptomatique dépend de la vitesse d’installation et du retentissement cardiaque.
L’hyperkaliémie menaçante (>7mmol/l et/ou signes ECG) est une urgence absolue. Il convient d’assurer:
- Protection cardiaque par du gluconate de calcium : antagoniste membranaire direct contre-indiqué en cas de traitement par digitaliques
- Transfert extra vers intracellulaire par perfusion intraveineuse d’un alcalinisant plasmatique (bicarbonate de sodium contre-indiqué en cas d’OAP associé), ou d’un soluté glucosé avec de l’insuline
- Elimination de la surcharge potassique : discuter l’épuration extra-rénale
Le traitement de l’hyperkaliémie modérée sans retentissement cardiaque repose sur :
- la diminution des apports oraux et intraveineux ;
- l’arrêt des mé0dicaments hyperkaliémiants ;
- l’élimination de la surcharge potassique par une résine échangeuse d’ions per os ;
- 9 alpha-fludrocortisone en cas d’hyperkaliémie liée à une insuffisance surrénale.
Le diagnostic positif est biologique. L’hypokaliémie est définie par une concentration plasmatique de potassium inférieure à 3,5 mmol/L. Les fausses hypokaliémies sont exceptionnelles.
La gravité dépend du caractère aigu ou chronique, du taux de potassium, et du terrain cardiovasculaire sous-jacent. Une hyperkaliémie importante et brutale peut mettre en jeu le pronostic vital à court terme et nécessite une hospitalisation en réanimation. L’hypo potentiel membranaire secondaire à la modification du gradient potassique intra-extracellulaire peut être à l’origine de manifestations cardiaques engageant le pronostic vital.
Le retentissement clinique d’une hypokaliémie est principalement cardiaque, musculaire et digestif. Les signes cardiologiques, secondaires à une augmentation de l’automaticité cardiaque et à un retard de repolarisation ventriculaire, se manifestent par des modifications électrocardiographiques diffuses d’apparition progressive : dépression du segment ST, aplatissement puis inversion de l’onde T, onde U ample, allongement du QT, élargissement des complexes QRS, troubles du rythme supra-ventriculaires et ventriculaires.
La réalisation d’un ECG est systématique devant tout diagnostic présumé ou confirmé d’hyperkaliémie. Les signes neuromusculaires sont non spécifiques : myalgies, crampes, faiblesse musculaire. Les signes digestifs sont non spécifiques : trouble du transit à type de constipation. Une déplétion potassique chronique peut être associé au développement d’une néphropathie interstitielle.
Trois mécanismes physiopathologiques doivent être recherchés, la kaliurèse doit être mesurée:
- un défaut d’apport : calcul des apports potassiques, anorexie mentale, nutrition artificielle ;
- un transfert extra intracellulaire : alcalose, insuline, b adrénergiques par stress catécholaminergique en situation aiguë ou salbutamol ;
- un excès d’élimination :
Le traitement est étiologique. Le traitement symptomatique dépend de la vitesse d’installation et du retentissement cardiaque.
L’hypokaliémie menaçante (>2,5mmol/l et/ou signes ECG) est une urgence absolue et repose sur des apports potassiques par voie intraveineuse (périphérique ou centrale) sous surveillance clinique, électrocardiographique et biochimique.
L’hyperkaliémie modérée sans retentissement cardiaque repose sur un apport potassique par voie orale par des aliments riches en potassium ou la prescription de sels de potassium, en particulier de chlorure de potassium.
La calcémie totale est de 2,20 à 2,60 mmol/L.
Calcémie corrigée = calcémie mesurée + 0,02 x (40 – albuminémie) |
La concentration plasmatique dépend:
- des entrées: apports alimentaires, absorption intestinale
- des sorties : élimination digestive et rénale
- du transfert du compartiment extracellulaire vers le compartiment intracellulaire osseux principalement.
-
La régulation du stock calcique est sous la dépendance de 3 hormones:
- la parathormone : synthétisée par la parathyroïde, elle augmente l’absorption digestive (stimulation de la synthèse de vitamine D), la réabsorption rénale et la résorption osseuse
- le calcitriol ou vitamine D : synthétisée par le rein sous l’action de la parathormone après un métabolisme hépatique, elle augmente l’absorption digestive et la résorption osseuse
- la calcitonine : synthétisée par la thyroïde, elle diminue la réabsorption rénale, elle diminue la résorption osseuse.
Le diagnostic positif est biologique avec une calcémie plasmatique >2,60mmol/L par calcul de la calcémie corrigée, soit par mesure directe du calcium ionisé >1,30mmol/L.
Le retentissement d’une hypercalcémie dépend du taux de calcémie, de la rapidité d’installation, du terrain sous-jacent. L’hypercalcémie déprime le système nerveux et l’acticité musculaire.
Les principaux signes sont non spécifiques : altération de l’état général, signes digestifs (douleur abdominale, nausée, vomissement), signes neurologiques (céphalée, confusion, hypotonie, hyporéflexie), signes rénaux (polyurie), signes cardio-vasculaires (hypertension artérielle, tachycardie).
Les signes électrocardiographiques en font la gravité : tachycardie sinusale, tachycardie ventriculaire, allongement du PR, raccourcissement du QT, onde T plates.
Une hypercalcémie aiguë importante (>3mmol/l) et/ou menaçante (signes ECG) est une urgence thérapeutique et nécessite une hospitalisation en réanimation. Une hypercalcémie chronique peut s’accompagner d’une néphropathie interstitielle, d’une pancréatite aiguë ou chronique, d’une lithiase urinaire ou biliaire.
Deux mécanismes physiopathologiques doivent être recherchés:
- une hypercalcémie liée à la parathormone
- une hypercalcémie indépendante de la parathormone
Le bilan phosphocalcique comporte : calcémie, phosphatémie, albuminémie, calciurie des 24h, phosphaturie des 24h, PTH plasmatique, calcitriol plasmatique.
Le traitement est étiologique.
Le traitement symptomatique d’une hypercalcémie aiguë menaçante (>3mmol/L, signes ECG) nécessite une hospitalisation en urgence en réanimation, une réhydratation importante intraveineuse par des solutés isotoniques, un traitement hypocalcémiant (biphosphonates par voie intraveineuse, diurèse forcée aux diurétiques de l’anse). Peut se discuter une épuration extra rénale. Le traitement symptomatique d’une hypercalcémie modérée comporte une réhydratation, éventuellement associé à un traitement hypocalcémiant (biphosphonates per os). Le traitement symptomatique comporte dans les deux cas une diminution des apports calciques, un arrêt des traitements hyperkaliémiants, un arrêt des digitaliques. La surveillance est capitale.
Le diagnostic positif est biologique avec une calcémie plasmatique <2,20mmol/L, par calcul de la calcémie corrigée, soit par mesure directe du calcium ionisé <1,1mmol/L.
Le retentissement d’une hypocalcémie dépend du taux de calcémie, de la rapidité d’installation, du terrain sous-jacent. L’hypocalcémie provoque l’excitation du système nerveux et une tétanie. Les principaux signes sont non spécifiques.
Deux mécanismes physiopathologiques doivent être recherchés :
- une hypocalcémie liée à la parathormone : chirurgie thyroïdienne, radiothérapie cervicale
- une hypercalcémie indépendante de la parathormone
La bilan phosphocalcique comporte : calcémie, phosphatémie, albuminémie, calciurie des 24h, phosphaturie des 24h, PTH plasmatique, calcitriol plasmatique.
Le traitement est étiologique.
Le traitement symptomatique d’une hypocalcémie aiguë menaçante (<1,5mmol/L, signes ECG) nécessite une hospitalisation en urgence en réanimation, un apport de calcium intraveineux (Gluconate de calcium). Le traitement symptomatique d’une hypocalcémie modérée comporte une substitution en calcium per os, une supplémentation en vitamine D. La surveillance est capitale.